Texte : Bernard M Laprade
C'est le 26, mars 1878 que le projet de la ligne Buzy-Laruns est présenté à la Chambre des députés. Les arguments en faveur de la lignes sont :
Le développement des stations thermales des Eaux-Bonnes et des Eaux-Chaudes. La princesse Eugénie de Montijo avait attiré aux Eaux-Bonnes une grande partie de la cour impériale et un grand nombre de savants.
Les Eaux-Chaudes, quand à elle, ont eu le privilège de recevoir l'épouse d'Henri IV pour soigner sa stérilité, ainsi qu'une de ses maîtresse, la belle Fosseuse;
L'exploitation des richesses minière de la vallée d'Ossau. Depuis 1784, date à laquelle le minéralogiste Palassou avait découvert les gisements de plomb et d'argent du lac d'Anglas, la mise en exploitation des mines par différentes sociétés atteignait des volumes importants ; à cela, il faut ajouter le marbre d'Arudy et celui de la haute vallée.
Rapidité des formalités
La Chambre des députés ayant adopté le projet, il est validé par le Sénat. Dès le mois de juin 1878, la déclaration d'utilité publique est entérinée et la loi autorise le ministère des Travaux publics à entreprendre les travaux. Il faut noter que les études n'ont pas duré plus de deux ans.
Le cahier des charges est adopté : l'embranchement pour la vallée sera situé à la sortie de Bélair, la pente maximum sera de 2 centimètres par mètre et un rayon maximum des courbes sera de 300 mètres. Un budget de 3.900.000 francs est voté.
Le 8 avril 1883, l'État a passé une convention avec la compagnie du Midi, représentée par Monsieur d'Eichthal, président du conseil d'administration, permettant à la dite compagnie d'exploiter provisoirement la ligne comme si elle faisait partie de son réseau. ( Contrairement à la ligne Pau-Oloron, construite par la compagnie du Midi à ses frais, c'est à la seule volonté de l'État que l'on doit la création de la ligne ferroviaire de la vallée d'Ossau Buzy-Laruns).
L’État remboursera les dépenses de premier établissement et le trésor paiera finalement 19.987.80 francs à la compagnie plus les charges de premier établissement de la gare de Buzy, respectant scrupuleusement ses engagements.
Cinq ans après la présentation du projet, le 30 juin 1883, l'exploitation est confiée à la compagnie du Midi. Le 1er juillet, un banquet est organisé à la gare de Laruns en présence du préfet, des maires, des notables et de Pierrine Gaston-Sacaze, le berger botaniste de Béost, âgé alors de 86 ans.
Le dimanche 1er juillet 1883 l'inauguration de la gare de Laruns a lieu. Préfet, sénateurs, députés, conseillers généraux, maires, toutes les personnalités régionales et locales avaient été conviées pour célébrer cet événement d'importance : le train allait enfin désenclaver la vallée d'Ossau.
Principales difficultés rencontrées
Le dolmen de Buzy, et le viaduc du pont Germe.
Le dolmen de Buzy est sur le tracé de la voie ferrée, il a donc été déplacé d'une quarantaine de mètres. Travaillant avec beaucoup de soin, Monsieur La Rivière, ingénieur des Ponts et Chaussées, trouva 79 silex taillés, des morceaux de poterie, une meule à grains et des pièces en bois de renne.
Il faut également souligner et noter la performance des ingénieurs qui déplacèrent le dolmen dont la pièce principale de 3,50 mètres sur 2,80 mètres et d'un poids de 15 tonnes.
Le viaduc du pont Germe deuxième difficulté situé à côté du pont du même nom. Les entrepreneurs du chemin de fer, MM. Palharey et Cerneau, signèrent avec la mairie d'Arudy, le 22 février 1880, une convention aux termes de laquelle Arudy concédait “ aux entrepreneurs, pendant la durée des travaux, moyennant la somme de 300 fracs payables le 31 décembre 1880, la carrière sise quartier du Caü, parcelle 12 du plan cadastral, et le droit d'extraire de cette parcelle tous les matériaux qui leur seront nécessaires pour la construction exclusive du viaduc jeté sur le gave en aval du pont Germe”.
Le viaduc fut construit en moins de trois ans.
Tramway électrique
Laruns _ Eaux-Bonnes
Le 18 juin 1893, le Courrier des Eaux-Bonnes annonce dans ses colonnes le projet des Eaux-Bonnes de construire un tramway électrique qui permettra l'acheminement rapide des voyageurs de la gare de Laruns à la station thermale.
Celle-ci draine à cette époque quelques 8.000 étrangers, touristes par an.
Une usine électrique que l'on édifiera au pied de la cascade du Valentin fournira l'énergie nécessaire à la traction de la machine. L'année suivante, Monsieur Jannequin est désigné pour étudier le projet. Et pendant de longues années, on parlera du tramway ; on en parlera mais on ne le verra jamais apparaître.
Plusieurs projets de trajets sont étudiés. Quelques articles virulents apparaissent sur les journaux, ridiculisant ce pauvre tramway qui n'en finit pas d'essayer de naître.
Loin d'être découragé le Syndicat d'Initiative des Eaux-Chaudes demanda en 1912, la réalisation d'un tramway électrique pour relier Laruns à Gabas en passant par les Eaux-Chaudes. Le sage Conseil municipal se contenta de reporter la décision à plus tard, signifiant en langage très ossalois, à jamais !
L'exploitation de la ligne
Le trafic voyageur, décolle en 1894, et continue sa progression jusqu'à la guerre.
Le trajet Buzy-Laruns est assuré par des trains légers et mixtes qui sont en général omnibus et un train express dont la vitesse (55 km/h) est terrifiante. Pour faciliter les excursions, le samedi et le dimanche, les trains ont des horaires adaptés. A la veille de la guerre 1939-1940, des trains couchettes et wagons-lits, en provenance de Paris, débarquent un nombre important de skieurs à Laruns qui sont ensuite acheminés par car spéciaux sur Gourette.
Le trafic marchandises est très variable et dépend de la densité des matières. Il y avait :
- Du minerai de la blende et mispickel argentifère et aurifère extrait des mines d'Arre et Anglas.
- Du minerai de spath-fluor du cirque de Néou.
- Du minerai de phosphate de la commune de Béost et celui de Lazive sur la commune des Eaux-Bonnes.
- Du minerai de blende et de galène presque pure (avec quelques 83% de plomb et 17% d'argent) ainsi que et surtout du cuivre sur la commune de Laruns.
- Du cuivre et du quartz en provenance des mines d'Aspeigt.
- Du minerai de fer au quartier de Las Meneras d'Ourdou sur la commune d'Aste-Béon.
- Du marbre, essentiellement en provenance d'Arudy et Izeste, et les marbres de la vallée d'Ossau ; de Gabas sur la commune de Laruns, le marbre de Louvie-Soubiron fut choisi en raison de sa blancheur, pour différents monuments de la capitale Paris, le marbre de Bart situé au quartier Pan sur la commune de Gère-Bélesten, et le marbre du Bénou sur les communes de Bielle et Bilhères, il fut utilisé pour l'église Notre-Dame d'Oloron et Saint-Joseph de Pau, et également pour le château royal de Laeken en Belgique.
C'est à Arudy que fut développé le sciage du marbre par un fil hélicoïdal transportant dans son hélice la silice qui sciait la pierre.
- Quelques villages du canton possédaient des gravières, sablières et carrières de pierre, qui ont été exploitées comme ballast pour les routes et chemins et les chemins de fer. Un train complet par jour partait pour Mouguerre où il était finement concassé pour être incorporé sous forme de poudre dans différents produits.
- A Izeste de la chaux extraite des fours dont on peut encore voir les deux grandes tours cylindriques.
- La forêt occupait une place importante, territorialement et surtout économiquement. Toute sorte de bois sous forme de grumes scié en planches. Arudy fut un centre important d'exploitation du bois, surtout lorsque Monsieur Lombardi mit au point le débardage du bois par câbles. Sapin, hêtre, houx, noisetier, et le buis que les forestiers se dépêchaient d'expédier dans le Jura où les tourneurs le transformait en pions de jeu d'échec, en tire bouchons, etc..,
La gare d'Arudy recevait aussi :
de la silice pour le sciage du marbre
du sable pour le moulage dans les trois fonderies
du minerai de fer en provenance des mines de Baburet, dans la vallée de Ferrières, afin de faire de la fonte au bas-fourneau électrique, utilisée essentiellement pour les chemises des moteurs de véhicules.
de l'acier laminé à chaud pour le laminage à froid.
C'est en 1929, que la ligne de chemin de fer fut électrifiée. Le courant provenait des usines hydroélectriques du Hourat Miègebat et Artouste situées en vallée d'Ossau.
La ligne Laruns Arudy a été fermée le 5 juillet 1971.
Et la ligne Arudy Buzy quand à elle a été fermée le 1eravril 2003 et officiellement le 10 février 2012.
Le Conseil d’administration de Réseau ferré de France,
Vu le code des transports et notamment les articles L. 2111-9 et suivants ;
Vu le décret n°97-444 du 5 mai 1997 modifié relatif aux missions et aux statuts de Réseau ferré de France ;
Considérant l’autorisation du ministre chargé des transports, en date du 10 février 2012, de fermeture de la section, comprise entre les PK 235,274 et 241,223, d’une longueur de 5,949 kilomètres, de Buzy à Arudy (Pyrénées-Atlantiques) de l’ancienne ligne n°665000 de Buzy-en-Béarn à Laruns ;
Et après en avoir délibéré,
Décide :
- Article 1er : La section, entre les PK 235,274 et 241,223, de Buzy à Arudy de l’ancienne ligne n°665000 de Buzy-en-Béarn à Laruns est fermée à tout trafic.
- Article 2 : La présente décision, immédiatement exécutoire, sera affichée en mairies de Buzy, Bescat et Arudy et publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques et au Bulletin Officiel de Réseau ferré de France consultable sur son site Internet (http://www.rff.fr/).
Fait à Paris, le 5 avril 2012 SIGNE : Le président du conseil d’administration Hubert du MESNIL
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