La vallée d'Ossau :              
                    Culture, et Mémoire.




LE CHEMIN DE FER

INAUGURATION - 1.07.1883
Ligne PAU-LARUNS

1

Ce Dimanche a eu lieu, comme nous l’avions annoncé, l’inauguration officielle du chemin de fer de Pau à Laruns, qui dessert également les deux stations thermales d’Eaux-Bonnes et d’Eaux-Chaudes.
    La compagnie du Midi n’ayant pas accordé le train spécial qui lui avait été demandé, on n’a pu suivre le superbe programme tracé par le Comité d’Arudy-Laruns, afin de donner à cette fête tout l’éclat qu’elle comportait.
   C’est donc dans le train ordinaire que sont montés, à la gare de Pau, M. le Préfet, ainsi que les autorités et bon nombre de personnes qui se rendaient avec plaisir à la gracieuse invitation qui leur avait été faite par le Comité.
    Dans les wagons-salon réservés à M. le Préfet, nous avons remarqué :

   MM. Garet et Cassou, députés,
   le Général Gaillard et M. de Bienassis, officier d’ordonnance,
   M.Lemoyne, ingénieur en chef, M. La Rivière, ingénieur ordinaire des ponts et chaussées,
   M. Hausser, ingénieur de la compagnie du Midi,
   M. Guibal, inspecteur ducontrôle de l’exploitation,
   M. Mascle, sous-préfet d’Orthez,
   M. Terrier, vice président du conseil de préfecture
   M. de Bernadotte, conseiller de préfecture,
   MM. Carrère, Lamothe-d’Incamps, Eugène Barthe et Larricq, conseillers généraux,
   M. Charles Thomas, chef de cabinet de M. le Préfet,
   M. Cames, chef de division à la préfecture,
   M. Douste, commissaire central de Pau,
   M. Palàa, conducteur des Ponts et Chaussées, etc.
   Un salon avait été réservé à la presse, qui était représentée par :
   M. Barthélemy de La République française,
   M. Routurier de La Gironde,
   M. Lamaignère du Courrier de Bayonne,
   M. Dumesnil du Mercrire d’Orthez,
   M. le Dr Delvaille de Bayonne,
   M. *** du Mémorial,
   M. Fréchou de L'indépendant,
   MM. Arêas et Cric-Crac du Courrier d’Eaux-Bonnes et de la Gazette d’Eaux-Chaudes.

   Un grand nombre de curieux avaient pris place dans les autres wagons ; le train était exceptionnellement long, la locomotive traînant le maximum de voitures.

    A l’arrêt de Buzy, les autorités d’Oloron et d’autres invités sont montés dans le train. Nous apercevons :
   M. Lesvier, sous-préfet d’Oloron,
   M. Rey, député,
   M. Aylies, procureur de la République,
   M. Casamayor, maire d’Oloron,
   M. Barberen, président du tribunal,
   M. Longuet, conducteur principal,
   M. Bourges, receveur des finances,
   M. Galisteo, vice-consul d’Espagne, etc., etc.

    A 1 h. 42 m. le train fait son entrée en gare de Laruns, où une foule enthousiaste accueille les voyageurs.
   En sortant, nous apercevons a l’entrée de l’avenue de la gare un superbe arc de triomphe portant la devise : Paix et Travail et des écussons au monogramme national.
    Le banquet ne devant avoir lieu qu’à cinq heures, le cortège officiel et les invités se rendent à Eaux-Bonnes. La petite ville thermale offre une animation inaccoutumée. Le jardin Darralde est brillamment décoré ; à chacune de ses entrées se dressent de coquets petits arcs de verdure surmontés de drapeaux ; partout des oriflammes et les lanternes vénitiennes déjà placées pour la fête de nuit.

    Vers 5 heures on est de retour à Laruns. Sur la place, à l’entrée de l’avenue de la gare, se trouve M. Pardies maire de Laruns qui, à la tête du conseil municipal, souhaite la bienvenue à M. le Préfet, en ces termes :
   Monsieur le Préfet,
    Soyez le bien venu parmi nous.
    Le maire de Laruns est heureux de saluer l’éminent administrateur, à l’esprit libéral, au caractère conciliant et ferme, qui représente, avec tant de succès, dans les Basses-Pyrénées le gouvernement de la République.
    Depuis des siècles, les populations de ces montagnes ont su joindre à la pratique des institutions libres, l’amour de l’ordre et le respect de l’autorité.
    Peu accessibles aux agitations politiques, elles n’en accueillent pas avec moins d’empressement tous les progrès réalisables et le souvenir d’un service rendu ne les trouvera jamais indifférentes.
    Honneur, donc, à la République. Par elle, dès aujourd’hui, la vallée d’Ossau entre, résolument dans une phase nouvelle et féconde de prospérité.
    Merci à vous, Monsieur le Préfet, qui avez, par efforts incessants, hâté l’inauguration, si désirée, du chemin de fer de Pau à Laruns. Eaux-Bonnes-Eaux-Chaudes.
    Merci, encore, à MM. nos Sénateurs et députés.
    Merci, enfin, à MM. les Ingénieurs. Dans cette oeuvre, si rapidement exécutée et si heureusement réussie, que de génie et de persévérance !
    C’est, donc, avec bonheur, que nos populations vont crier, aujourd’hui : Vive la République.
    M. le Préfet, répond à M. le maire de Laruns et le remercie des sentiments qu’il vient d’exprimer.
    Le cortège passe ensuite sous l’arc de triomphe dressé à l’entrée de l’avenue et se dirige vers la salle du banquet.
   L’escorte est formée par la gendarmerie, les gardes forestiers, les douaniers, les sapeurs-pompiers de Laruns, ayant à leur tête M. Piquemal, capitaine, et les sapeurs pompiers d’Eaux-Bonnes commandés par M. Jules Tourné, lieutenant.
   Nous remarquons attachées à la hampe de leur drapeau les quatre médailles remportées par la subdivision Eau-Bonnaise au dernier concours de Libourne.
    Une foule immense accompagne le cortège ; à son arrivée dans la cour de la gare, l’Orchestre municipal d’Eaux-Bonnes, dirigé par M. Henry Beumer, joue la Marseillaise. L’orchestre installé sur la plateforme de la gare, exécute ensuite divers morceaux.
   M. le Préfet s’adressant à M. Beumer le remercie et le félicite cordialement ;

   La gare des marchandises où doit avoir lieu le banquet est pavoisée. A l‘intérieur la salle de banquet offre un fort joli coup d’oeil.
   Elle est toute enguirlandée, ornée de faisceaux de drapeaux. Les quatre tables dressées avec un goût parfait sont surchargées de fleurs et de pièces montées d’une exécution irréprochable, parmi lesquelles on remarque une magnifique locomotive en nougat, admirablement réussie dans ses moindres détails, vrai chef d’oeuvre dû aux doigts habiles et expérimentés de l’aimable chef de l’Hôtel des Princes.
    M. Laurens, Préfet des Basses-Pyrénées, prend place à la table d’honneur. A sa droite se trouvent :
   MM. La Caze, sénateur,
   Cassou, député,
   le général Gaillard,
   Porte, conseiller général du canton de Laruns,
   Mascle, sous-préfet d’Orthez,
   Barberen, président du tribunal de 1re instance d’Oloron
   Bernadotte, conseiller de préfecture,
   Lemoyne, ingénieur en chef, La Rivière, ingénieur ordinaire
   et Courtade, maire d’Eaux-Bonnes.
    A gauche de M. le Préfet sont assis :
   MM. Rey et Garet, députés,
   Lesvier, sous-préfet d’Oloron,
   Camps, conseiller général du canton d’Arudy,
   Aylies, procureur de la République à Oloron,
   Terrier, vice-président du conseil de Préfecture,
    Dr Valéry Meunier, médecin-inspecteur d’Eaux-Bonnes,
   Hausser, ingénieur de la Compagnie du Midi,
   Casamayor-Dufaur, maire d’Oloron,
   Pardies, maire de Laruns,
   lieutenant de Bienassis, officier d’ordonnance de M. le général Gaillard,
   et M. Charles Thomas, chef de cabinet de M. le Préfet.

         Aux trois autres tables étaient assis :
   MM. Carrère, Lamothe-d’Incamps,
   Larricq et Eugène Barthe, conseillers généraux,
   Galisteo, vice-consul d’Espagne à Oloron,
   Andral sous-inspecteur d’Eaux-Bonnes,
   Bernis et Minvielle, juges de paix,
   Bourges, receveur des finances à Oloron,
   Castéran, garde général des Eaux et Forêts,
   MM. Tapie et Gustave Tourné, conseillers d’arrondissement,
   Longuet, Rousse et Palaa, conducteurs des ponts et chaussées,
   Reboul, chef de section de la Compagnie du Midi,
   Guibal, inspecteur de l’exploitation des chemins de fer du Midi,
   Gaston Sacaze,
   MM. Barthélemy de La République Française,
   Routurier de La Gironde,
   Fréchou, rédacteur en chef de l'Indépendant,
   *** du Mémorial de Pau,
   Delvaille, adjoint au Maire de Bayonne,
   Lamaignère du Courrier de Bayonne,
   Goude-Dumesnil du Mercure d’Orthez,
   D Cazaux du Journal des Eaux-Bonnes,
   Almeida Arêas et Cric-Crac du Courrier d’Eaux-Bonnes et de la Gazette d’Eaux-Chaudes,
   Hora-Adéma,
   Barthe et Laborde, chefs de section,
   Cames, chef de division de la préfecture,
   Dupuy, conducteur des ponts et chaussées,
   Saurel, receveur des douanes à Laruns,
   de Portal, percepteur à Laruns,
   Piquemal, capitaine des sapeurs-pompiers de Laruns,
   Jules Tourné, lieutenant des sapeurs-pompiers d’Eaux-Bonnes,
   Mailhe, chef de gare,
   Loumiet, Artiaque et Gui de la Vilette, conseillers municipaux de Laruns,
   Berge, commissaire de police de Laruns,
   Casamajou-Pujou adjoint au maire d’Eaux-Bonnes,
   Plou,maire de Castet
   Berge, maire d’Arudy et président du syndicat du Bas-Ossau,
   Capdevielle, adjoint au maire d’Arudy,
   Bonnecaze, maire de Bilhères et vice-président du syndicat du Haut-Ossau ;
   MM. Medevielle, Casamajou, Nouzeret, Sacaze, Peyrecave et Sens-Carrère conseillers municipaux et délégués du syndicat du Haut-Ossau,
   Cazassus, maire de Bielle,
   Casamajor-Sallenave, adjoint au maire de Bilhères,
   Honda, maire de Gère-Belesten,
   Cazassus, adjoint au maire d’Aste-Béon,
   Tresarrieu, maire de Louvie-Soubiron,
   Fortayou, maire de Béost,
   Lacazanave-Morlanne, adjoint au maire de Laruns,
   et plusieurs autres maires, adjoints, conseillers municipaux, délégués des Syndicats, fonctionnaires et invités dont nous regrettons de n’avoir pu retenir les noms, au milieu de la grande affluence qui se pressait dans la salle du banquet.
   Le dîner, servi par les soins de MM. Murret-Labarthe et réussi en tous points, a été digne de là grande réputation de l’hôtel des Princes d’Eaux-Bonnes, dont MM. Murret-Labarthe sont les sympathiques et intelligents propriétaires.
   L’organisation de ce banquet poursuivie au milieu de difficultés de toute sorte, leur fait le plus grand honneur ainsi qu’au personnel de choix attaché à leurs fourneaux et à leurs tables.    

Voici d’ailleurs, le menu, vrai bijou gastronomique.

         *MENU*
    Potage national.
    Bisque d’Ecrevisses.
    Saumons à la Daumont.
    Filet de Boeuf à la Richelieu.
    Jambon d’ Yorck au Madère.
    Aspic de Homard en Belle-Vue.
    Petits pois à la bonne femme.
    Asperges d’Argenteuil, aux sauces hollandaise et ravigote.
    Poulardes de Bresse rôties.
    Bombes à l’orange et vanillées.
      Inauguration-gâteau.
    Pièces montées variées.
    Petits fours fondants.
    Abricots, Poires St-Jean, Cerises, Fraises des montagnes.

    Barsac et Graves 1875
    Chateau Laroque 1875.
          Jurançon.
    Chateau Letertre 1874.
    Champagne duc de Montebello frappé.
   
   Au dessert, plusieurs discours sont prononcés et de nombreux toasts sont portés, au milieu des applaudissements.    

Sur l'estrade se sont succédés différentes personnalités :

   M. LAURENS, préfet des Basses-Pyrénées. Messieurs,
En m’appelant à l’honneur de présider la fête de l'inauguration de la ligne ferrée de Buzy-Laruns, vous avez pressenti la satisfaction que j’en éprouve, vous avez justement apprécié tout l’intérêt que je porte à votre pays et tout le prix que j’attache à votre confiance. Ce sentiment de votre part me pénètre et me touche et j’ai à coeur de vous en remercier. Si nous n’ouvrons aujourd'hui qu'une partie secondaire de la ligne vous savez par suite de quelles circonstances indépendantes de toute volonté, l’ouverture simultanée des deux lignes n’a pas été possible.
  Cette inauguration partielle n’est d’ailleurs que le préliminaire de celle que nous célébrerons au premier jour pour la ligne entière dont Oloron est l'objectif essentiel. Et ce jour est prochain, plus prochain qu'on ne le pense ! Je ne crois pas trop m’avancer en assurant que dans les derniers jours du présent mois, grâce aux efforts vraiment exceptionnels de M. l’Ingénieur de la Compagnie du Midi, il me sera possible de visiter en wagon la voie entière et d’arriver à Oloron par un train ordinaire.
  Or, on sait que l’ouverture aux voyageurs de la ligne Buzy-Laruns a suivi de très près le premier parcours que j’y ai effectué tout récemment. Il m’a paru nécessaire de formuler ici cette assurance. Ce résultat complet auquel nous touchons pour ainsi dire, que nous désirons ardemment et dont nous hâterons de tout notre pouvoir la réalisation, ce résultat doit nous remplir tous de confiance et de satisfaction.
  Représentants du Pays d’Ossau, un grand fait s’accomplit aujourd’hui dans la vallée ! En présence des résultats considérables qu’il est appelé à produire, en présence des grands intérêts qu’il est destiné à féconder, tout dissentiment doit disparaître. Doutes, craintes, diversités de vues, rivalités locales, tous ces sombres nuages, doivent s’enfuir au loin, chassés par votre patriotisme derrière la barrière infranchissable de vos pics et de vos glaciers pyrénéens. Il ne doit rester place que pour l’espérance, la joie et l’union, dans le cœur de tous les Ossalois !
  C’est à ces sentiments que s’associe le magistrat que le gouvernement de la République a placé à la tête de ce beau département, auquel il est uni par des liens de plus en plus étroits et qu’il s’efforcera d’administrer toujours avec le même esprit de justice, de sagesse, de respect absolu de la loi et de fidélité républicaine.
  Mais ce n’est pas seulement de la satisfaction pour nous-mêmes que nous venons chercher ici, nous venons y rendre hommage à une pensée plus patriotique et plus élevée. La solennité de ce jour est un témoignage ajouté à tant d’autres qui proclament la supériorité incontestable du génie de la civilisation moderne sur celle des temps passés. Cette supériorité est manifeste dans toutes les branches de l'économie politique, dans tous nos travaux publics, dont le système révèle à un haut degré l’union de la grandeur du pays avec le développement de tous ses progrès, avec le bien-être de toutes les classes de sa population. L’ouverture de votre chemin de fer est la démonstration de cette vérité.
  L’éclat que vous donnez, messieurs, à cette inauguration, dit assez que vous en comprenez toute l’importance.
   C’est qu’en effet la voie de Buzy à Laruns traverse une vallée qui compte parmi les plus pittoresques et les plus riches des Pyrénées. Jusqu’à ce jour, l’insuffisance des voies de communication avaient laissé ses richesses, improductives. Les forêts de Gabas, les superbes marbres de Louvie-Soubiron et d'Izeste, les laines et les bestiaux, les mines de fer et de cuivre, les nombreuses carrières inexploitées que recèlent vos montagnes, trouveront désormais de nombreux débouchés. La voie ferrée facilitera les relations d’une région très peuplée, riche en matières premières, avec les principaux centres du Midi ; elle favorisera l’exportation et apportera en retour à une population laborieuse, les élément d’une prospérité jusqu'ici inconnue. Les étrangers viendront en plus grand nombre dans vos stations thermales attirés par les facilités du voyage et par la ma gnificence de vos sites.
  Quel spectacle plus beau pourrait s’offrir à leur vue ? Au sortir du souterrain de Belair, après avoir franchi la station de Buzy, au seuil de cette vallée d’Ossau, on apperçoit Sévignacq qui semble planer sur elle, la ville d’Arudy, centre agricole important et la plaine fertile où le Gave précipite ses eaux claires et rapides, Louvie-Juzon, Izeste avec sa montagne de verdure ; en face, apparait dans toute sa majesté, comme une immense pyramide, le pic du Midi d’Ossau. Plus loin, la vallée se rétrécit, la voie coupe des carrières de marbre et domine le torrent ; des deux côtés, de majestueuses montagnes cultivées dans les parties inférieures, couvertes au sommet d’arbres vigoureux et riches prairies. A gauche, voici les ruines pittoresques de Castet et Bielle dont l’église contient les deux colonnes de marbre qui valurent au roi Henri cette réponse si béarnaise: « Nos biens et nos cœurs sont à vous, Sire, disposez-en à votre volonté, quand aux colonnes, elles appartiennent à Dieu, entendez-vous avec lui. » A droite, apparait Bilhères, coquettement campé sur le flanc de la montagne et, quelques instants après, la ville de Laruns.
  Mais il est une autre considération que j’expose la dernière, à cause de son importance spéciale et de sa valeur humanitaire, c’est la puissante impulsion que recevra l’exploitation de vos deux stations thermales. Leur réputation date de loin, leur action bienfaisante est connue du monde entier.

   M. REY, député de l’arrondissement d’Oloron. Messieurs,
  La joie que j’éprouve aujourd’hui est immense. Après plusieurs années d’attente et d’efforts, nous avons enfin atteint le résultat si longtemps désiré.
  Je ne puis cependant me défendre d’une certaine tristesse, en pensant à la vieille cité Oloronaise. Sans aucune jalousie, elle s’associe à notre joie ; elle est de cœur avec nous, mais quelle n'aurait pas été notre satisfaction à tous, s’il nous avait été donné d'assister à la fois à l’inauguration des deux lignes.
  Je tiens à dire ici qu’il n’a dépendu ni de l’administration départementale, ni du gouvernement, ni des démarches répétées de vos représentants, que satisfaction soit donnée au cheflieu.
  Je n’insiste pas ; je ne dois pas oublier que la Vallée d’Ossau est en liesse.
  Depuis des années tout le monde avait compris qu'il était impossible de laisser plus longtemps en friche, permettez-moi cette expression, nos établissements thermaux.
  Nos rivaux Bagnères-de-Luchon, Cauterets étaient déjà dotés de voies ferrées. Seules les stations d'Eaux-Bonnes et d’Eaux-Chaudes en étaient dépourvues ; la situation s’aggravait, la lutte n’était plus égale ; C’était une sorte d’expropriation au profit de nos voisins sans indemnité pour nous.
  Il appartenait à la République de faire cesser cette situation anormale et si préjudiciable, non seulement à nos établissements, mais encore aux intérêts agricoles, industriels et pastoraux de cette belle vallée.
  A peine relevée des désastres de cette fatale guerre de 1870, encore meurtrie par tous les sacrifices que s’était imposés le Pays, la France s’est mise à l'œuvre.
  Le gouvernement avait compris qu’il était impossible de laisser plus longtemps inexploitées, faute de moyens de transport, les richesses de toutes sortes que renferment nos montagnes. C'est à son initiative que nous devons la création de ce chemin de fer dont nous fêtons aujourd’hui l’inauguration. C’est encore à son initiative que nous devons cette route de Gabas que la population Ossaloise attend avec une si juste impatience, route qui doit favoriser non seulement la prospérité des Etablissements thermaux, mais en reliant les deux pays voisins augmenter notre commerce et faciliter l'exploitation de nos mines et de nos forêts.
  Je le répète et c’est l'honneur de la République d'avoir mené à si bonne fin ces grandes et belles entreprises.
  La République seule était capable de donner à ses enfants, avec le bien-être matériel le bien-être moral.
  Car en même temps qu’elle employait ses ressources à sillonner le pays de chemins de fer, elle n'oubliait pas qu’elle lui devait l’instruction et l’éducation ; je suis heureux de le dire ici au milieu de ces populations intelligentes et laborieuses qui m’écoutent, dans ce canton de Laruns qui a l’insigne honneur d’occuper la première place dans la carte d’instruction du département.
  Sur tous les points du territoire se sont donc élevées des écoles ou la masse entière du peuple, comme dit Condorcet, peut apprendre ce que chaque homme a besoin de savoir, pour l’économie domestique, pour l’administration de ses affaires, pour le libre développement de son industrie et de ses facultés, pour connaître ses droits, les défendre et les exercer, pour être instruit de ses devoirs et n’être étranger à aucun des sentiments élevés ou délicats qui honorent la nature humaine.
  Elever le niveau de la prospérité matérielle et morale du pays par tous les moyens qui sont en son pouvoir ; en donnant l’éducation au peuple, faire ennoblir le travail manuel, créer des canaux, des routes, des chemins de fer, protéger l’industrie naturelle, dégrever l'agriculture dès que notre situation financière le permettra, telle est la mission de la République.
  C’est à cette œuvre éminemment patriotique d’indépendance, de travail et de relèvement que les hommes d’Etat qui dirigent actuellement les affaires de notre pays emploient leur intelligence et leur énergie. Ils ne faibliront pas devant cette lourde tache, notre devoir à nous, citoyens c'est de la leur rendre plus douce et plus facile en respectant les lois et les institutions que le pays s’est librement données
  Monsieur le Préfet,
  Je suis sûr d’être l'interprète de tous en vous remerciant de votre sollicitude pour les intérêts du Département ; votre zèle et votre dévouement nous ont toujours été d’un puissant concours, nous ne pouvons que nous féliciter de vous avoir à la tête de l’administration départementale, aussi vous pouvez compter sur toute notre reconnaissance. Je vous propose messieurs de boire à la santé de M. Laurens Préfet des Basses-Pyrénées

   M. Louis LA GAZE, sénateur. M. Louis LA GAZE, sénateur.
   Messieurs,
  Il y a huit ans que le Parlement déclarait d’utilité publique le chemin que nous inaugurons. Que d'obstacles à vaincre pendant ces cinq ans, que de rochers à percer, de terres à soulever, d’intérêts à concilier, d'impatiences à contenir ! Enfin, nous voilà au jour qui a été pour nous l’objet d’une si longue attente, et qui, si vous permettiez a un ouvrier de la première heure de parler de lui, réalise une des plus chères ambitions de ma vie. Sans doute, comme l'a dit mou ami M. Rey, nous avions l’espoir de faire deux inaugurations à la fois et de marier le même jour ces deux sœurs qui s’appelent Oloron et Laruns. La force des choses s’y est opposée. Et bien ! mes chers compatriotes, nous ferons deux noces, et célébrerons deux fêtes : les mariées en valent bien la peine ! une ici, aujourd’hui, avec le décor magique de ces montagnes, l'autre bientôt, là-bas, avec le décor de nos trois collines illustrées par les souvenirs de la vieille cité. Salut Messieurs, au chemin d’Ossau
  Je regardais tout à l'heure en traversant cette vallée incomparable le vieux château de Castet penché du roc ou l’ont bâti nos pères, sur le train en marche. Je pensais à ces dolmens du Benou silencieux et graves, je regardais ce torrent dont la voix dominait tout autre bruit dans le vallon silencieux, témoins des âges évanouis, qu’en dites vous ? Voilà le génie de la civilisation qui passe, touchant de sa baguette d’or le rocher, la forêt, la plaine, non pour diminuer la poésie eternelle de ces lieux enchantés, et la religion des souvenirs, non pour mettre le pied sur un seul des mots de notre idiome, ni pour déchirer un seul de nos capulets, ni surtout pour porter atteinte a l’originalité de cette race dont les traditions d’indépendance et de courtoisie de modération et de fierté qui caractérisent au sein de la grande famille Française, notre Béarn bien aimé. Non, non.
  Il vient féconder ces eaux auquelles Dieu a attaché la vertu qui guérit les maux du monde, exploiter ces grands arbres qui mouraient de vieillesse a leur place, fouiller ces carrières qui s'ignorent, il vient décupler le prix de votre labeur, O gardiens hospitalier de ces sources, O laboureur courbés sous le poids du jour, O pasteurs qui avez depuis des siècles su mettre en valeur jusqu’à une poignée d’herbe poussant entre les rocs de Monscabarous, de Sesques et de Cézy ! Salut, Messieurs, à la prospérité de l’avenir.
  Monsieur le Préfet, pour vous souhaiter la bien-venue, nous n’avons qu'à vous demander de lire sur nos visages les sentiments de gratitude et de joie qu’ils expriment et qui vous accueillent au milieu de nous ! les vraies fêtes comme sont les vrais deuils, les hommes y oublient un instant leurs dissentiment et leur lutte pour se rapprocher dans un seul sentiment de joie ou de tristesse qui est comme la fugitive image de cette concorde des esprits qui sera le couronnement de notre histoire.
  Ici, en levant mon verre en votre honneur, je suis sur d’être l’interprète de la population d’Ossau tout entière et quand je cherche le meilleur souvenir que nous puissions vous laisser de cette belle journée, je n’en vois pas de plus digne de vous et de nous mêmes que le spectacle de notre allégresse.

   M. E. GARET, député de la 1er circonscription de Pau.h M. E. GARET, député de la 1er circonscription de Pau.
   Messieurs,
   Permettez-moi de remplir un devoir filial en n'oubliant pas dans cette fête la ville de Pau, qui, à l’autre extrémité de cette voie ferrée dont nous célébrons l’ouverture, a droit aussi de se réjouir.
   Pau, la reine des stations hivernales de la région pyrénéenne se voit enfin rattachée, par un trait d'union que rien ne saurait rompre, à ces sources bienfaisantes dont les vertus thermales complètent si puissamment ses vertus climatériques.
   Pau, Eaux-Bonnes, Eaux-Chaudes se donnent aujourd’hui la main, grâce à la vapeur qui supprime entre elle la distance et joint en un fraternel contact leurs avantages mutuels.
   C’est une ère nouvelle de vogue et de prospérité qui se prépare pour nos belles montagnes et dont les intérêts de la ville de Pau ne peuvent qu’heureusement se ressentir.
   C’est pourquoi nous associons nos vœux à vos espérances et remercions avec vous, tous ceux qui ont concouru à l'œuvre accomplie.
   Nous nous associons aussi aux remerciements adressés a celui qui nous préside, non seulement pour tout ce qu’il a fait afin d’obtenir le prompt achèvement de cette ligne, mais encore pour tout ce qu'il a fait durant les trois années de son administration féconde.
   Pau lui garde, je me sens autorisé à le dire, un sentiment profond d’estime et de reconnaissance. Nous n’oublierons jamais l’administrateur clairvoyant et sage, que nul obstacle n’irrite ni ne déconcerte, aussi entreprenant qu’avisé lorsqu’il s’agit de mener à bien un des intérêts quelconques de ce beau département qu’il aime, aussi prudent que ferme quand il s’agit de défendre les intérêts sacrés de la République, qu’il représente si loyalement, si dignement, parmi nous
   Au nom de la ville de Pau, je m’associe aux vœux qui s’adressent à la vallée d’Ossau, et j’y joins l'hommage d'une affectueuse gratitude pour notre excellent et cher Préfet.

   M. CASSOU, député de la 2em circonscription de Pau. M. CASSOU, député de la 2em circonscription de Pau.
   Messieurs,
   J'ai l’honneur de vous proposer un toast de félicitations et de remercîments à MM. les Ingénieurs de l’Etat et à M. l’Ingénieur de la Compagnie du Midi.
   N'oublions pas que l’embranchement de Buzy à Laruns, que nous inaugurons aujourd’hui, n’a été déclaré d’utilité publique qu’en 1878.
   Il a fallu d'abord procéder aux expropriations et vous savez combien ce préalable est long et minutieux. Elles se terminaient à peine en août 1881 ; c'est seulement à cette époque qu’étaient acquis les terrains sur lesquels nous venons de faire cet excellent repas.
   Les travaux commençaient en 1880. Ils ont été difficiles et compliqués : presque partout du rocher à faire sauter à la mine ; des ponts d’autant plus nombreux à élever que les torrents sont plus fréquents ; un viaduc à construire à Germe, œuvre devant laquelle on ne peut passer sans admirer sa hardiesse et sa solidité.
   Tout cela a été fait avec une inconcevable rapidité par MM. Lemoyne et La Rivière Ingénieurs de l’Etat.
   Mais quelle qu’ait été leur activité, la ligne n’aurait pu être livrée aujourd’hui, si M. Hausser Ingénieur de la Compagnie du Midi ne s'était absolument dévoué à l’œuvre. Comprenant tout l'intérêt qu’il avait à procurer aux établissements d’Eaux-Bonnes et d’Eaux-Chaudes les avantages de l’ouverture de la ligne au début de la saison actuelle, il a appliqué à cette entreprise toutes les facultés et tous les moyens d’action que la Compagnie du Midi avait généreusement mis à sa dispositon
   A la rapidité avec laquelle s’est opérée la transformation à laquelle nous assistons aujourd'hui, ceux qui ont vu les lieux au début des travaux seraient presque tentés de croire à l’effet d’une baguette magique
   Honneur donc à MM. Lemoyne et La Rivière, Ingénieurs de l’Etat !
   Honneur à M. Hausser, Ingénieur de la Compagnie du Midi !
   Ils ont tous trois bien mérité de la Vallée et du Pays.
   Et comme il importe d’être juste envers tous, Vive le Gouvernement sous lequel s'est accomplie cette merveille !

   M. LEMOYNE, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées. M. LEMOYNE, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées.
   Monsieur le Député,
   Je vous remercie des félicitations que vous venez d’adresser aux ingénieurs. Je les accepte avec reconnaissance, mais en ajoutant que les félicitations doivent revenir en grande partie aux chefs de section et aux agents de l’Etat et de la Compagnie du Midi ; car, je dois le reconnaître, si les difficultés de toutes sortes que nous avons rencontrées dans la construction du chemin de fer, ont pu être surmontées, c’est grâce au zèle et au dévouement constant dont tout le personnel a fait preuve pendant l’exécution des travaux.
   Les ingénieurs sont heureux d’avoir construit une voie ferrée qui en pénétrant dans cette belle vallée d’Ossau, va lui apporter une nouvelle vie et augmenter l’importance si considérable déjà des établissements thermaux d’Eaux-Bonnes et d’Eaux-Chaudes. Ils regrettent vivement de n’avoir pu terminer en même temps la ligne d’Oloron ; mais ils font en ce moment tous leurs efforts pour qu’il soit donné satisfaction, dans le plus bref délai possible, au vœu si légitime du chef-lieu de l’arrondissement.
   Au nom des Ingénieurs, des chefs de section et des agents du service des chemins de fer, je porte un toast aux Sénateurs et Députés des Basses-Pyrénées qui se sont toujours préoccupés et se préoccupent encore de doter le département de nouvelles lignes de chemins de fer.
   A M. le Sénateur La Gaze ;
   A MM. les députés des arrondissementsde Pau et d’Oloron.

   M. HAUSSER, ingénieur en chef de la Compagnie du Midi. M. HAUSSER, ingénieur en chef de la Cie du Midi.
   Je regrette Messieurs que ce soit à moi qu’incombe la délicate mission de répondre au nom de la Compagnie des chemins de fer du Midi à tant de choses aimables.
   Puisque mon nom a été prononcé par des orateurs trop bienveillants, qu’ils me permettent de leur offrir l’expression de mes sentiments de gratitude avec une réserve toutefois.
   La bonté a été poussée au-delà de toute limite et je suis obligé de diminuer beaucoup les paroles trop flatteuses qui ont été dites.
   Dans le peu que l’équité me permet de conserver je prendrai la liberté de faire deux parts.
   Je reporterai l’une sur la Compagnie qui nous a donné les pouvoirs pour agir, je reporterai l’autre sur mes collaborateurs sur M. Rebaul présent parmi vous qui joint à une expérience consommée, un inaltérable dévouement et — qualité rare — une invariable modestie.
   Le dévouement, Messieurs, la Compagnie est décidée à le donner et à le demander à tous ses agents pour la réalisation de cette œuvre des chemins de fer qui entre aujourd’hui dans une phase nouvelle.
   L’ouverture de la ligne de Buzy à Laruns est comme le vivant témoignage de la décision du gouvernement de doter de voies ferrées même les régions deshéritées et de répandre les bienfaits dans toute notre patrie — cette terre classique de l’égalité !
   Au début de l’industrie des chemins de fer, les grandes vallées seules devaient être dotées de ce puissant moyen de civilisation. Thiers, qu’on a représenté à tort comme un ennemi des chemins de fer ne soutenait que les grandes artères. La réalisation de ses idées justes, peut-être en 1840, serait aujourd’hui une monstrueuse iniquité !
   Après la crise de 1847 et les convulsions politiques de 1848 l’industrie des chemins de fer traversa une phase douloureuse.
   L'Etat comprit alors mieux que jamais la nécessité de faire de la création des voies ferrées une œuvre commune entre les Compagnies, et lui-même, en demandant beaucoup aux Compagnies et en réduisant au strict nécessaire les sacrifices du Trésor public.
   En 1859 nous avons les grandes lignes des gandes vallées qui sont l’ancien réseau et les lignes nouvelles des vallées secondaires qui sont le nouveau réseau.
   Pour la création et l’exploitation du nouveau réseau on prit la sage mesure de déverser les bénéfices des grandes lignes sur les petites qu’on imposa aux Compagnies en garantissant l’intérêt.
   Le déversoir de la ligne riche sur la ligne pauvre et la garantie d’intérêt forment le moyen ingénieux et économique qui a permis la constitution du nouveau réseau.
   Et à cette œuvre de justice et de progrès le nom de M. de Franqueville restera toujours attaché.
   Mais aujourd'hui le nouveau réseau ne suffit plus, il faut pénétrer dans les vallées lointaines comme cette belle vallée du Gave d’Ossau. Il ne faut pas regretter, Messieurs, que depuis des années le Parlement ait jugé opportun de soumettre le régime des chemins de fer aux études les plus attentives. Les critiques les plus nombreuses, les plus vives ont été formulées. Ainsi l’exige le progrès. Du choc des idées jaillit la lumière. La question a été reprise à fond, examinée en détail on a parlé de refondre l’œuvre, de racheter les chemins de fer et ces études multiples, ont abouti aux nouvelles conventions qui vont doter notre pays d’un troisième réseau.
   L’Angleterre et l’Amérique qu’on cite souvent comme les pays modèles de la liberté ne nous offrent rien de semblable. Là-bas, n’ont de chemins de fer que les régions qui peuvent les payer.
   A ce titre vous en eussiez été éternellement privés.
   Je le dis à l’honneur de la France le progrès est chez nous, car nous savons donner à ceux qui n’ont pas. Si nous avons autant que qui que ce soit souci de la liberté, nous avons inscrit aussi au frontispice de nos lois et de nos monuments — Egalité, Fraternité —
   Nous ne l’oublieronsjamais.
   On raconte que M. de Franqueville en constituant le nouveau réseau, s’écria : « C’est une œuvre de solidarité démocratique.»
   M. le ministre des travaux publics s’est inspiré de la même pensée ; Il a su avec des modifications ingénieuses et nombreuses, l’adapter à notre situation actuelle.
   M. Raynal aussi a su faire œuvre de démocratie et de solidarité en constituant le troisième réseau.
   En levant mon verre devant cette ligne de Buzy-Laruns qui est dans nos régions la première manifestation de cette grande pensée du troisième réseau je vous convie. Messieurs à joindre vos vœux aux miens.
   A monsieur le ministre des Travaux publics, A monsieur le Préfet des Basses-Pyrénées le sympathique représentant du gouvernement, au concours de l'Etat et des Compagnies pour la réalisation de ce troisième réseau pour la grandeur et la propérité de notre chère patrie française.

   M. F. COURTADE, maire d’Eaux-Bonnes M. F. COURTADE, maire d’Eaux-Bonnes.
   Messieurs,
   L’honorable convive à qui je vous demande la permission de porter un toast va sans doute être blessé dans sa modestie.
   Mais je le prie de vouloir bien m’excuser. Le maire des Eaux-Bonnes manquerait à un devoir de reconnaissance, c’est à dire au plus sacré des devoirs, s’il négligeait l’occasion de remercier publiquement l'un des hommes qui ont le plus fait pour hâter l’ouverture de ce chemin de fer.
   Merci donc à M. le docteur Valéry Meunier !
   Je bois à M. l’Inspecteur des Eaux-Bonnes !

   M. le DF VALÉRY-MEUNIER, médecin-inspecteur d’Eaux-Bonnes. M.le Dr VALÉRY-MEUNIER, médecin-inspecteur d’Eaux-Bonnes.
    Je remercie de tout cœur M.le maire des Eaux-Bonnes des sentiments trop bienveillants pour moi qu’il vient de nous exprimer.
   Je voudrais avoir mérité tout ce qui a été dit, mais je ne me fais pas illusion, et je ne l’accepte que comme un encouragement et un motif nouveau de ne rien négliger de ce que je considère comme mon devoir.
   Permettez-moi Messieurs, de reporter à qui de droit ce que vous venez d’entendre, et de vous proposer un nouveau toast. Nous n’avons pas épuisé la liste de nos bienfaiteurs.
   Nos premiers hommages de reconnaissance ont été pour le Gouvernement de la République — et c’était absolument dû, — car il a fait pour nous tout ce qui n’était pas impossible.
   Nous ne séparons pas de lui ceux qui le représentent parmi nous, ces administrateurs vigilants et patriotes, ces savants ingénieurs, ces sénateurs et députés si ardemment dévoués aux populations qu’ils représentent. Par leur autorité, par leur valeur technique, par leurs sympathies actives ils ont assuré la réalisation de nos vœux.
   Mais ils ont eu, Messieurs, des coopérateurs plus obscurs, moins connus de vous, dont l’action a été cependant des plus efficaces, la plus décisive peut être. Ce sont nos malades, Messieurs, et ils ont le droit de ne pas être oubliés.
   Tant que nous avons parlé des intérêts agricoles, industriels de notre région, de sa prospérité économique, même de celle de nos établissements thermaux, nous étions écoutés avec bienveillance, et l’on nous témoignait les meilleures intentions. Mais notre langage ne différait guère de celui que le Gouvernement entend tous les jours, puisqu’aux quatre coins de la France il y a des populations dont l’impatience est tout aussi légitime, et qui attendent l’achèvement de travaux publics importants.
   C’était demander une véritable faveur que d'insister sur ce terrain là.
   Mais du jour où l’on sut en haut lieu qu’avec des efforts soutenus, énergiques — comme ceux dont nous avons été témoins — on pourrait épargner à deux ou trois mille malades les fatigues d’un voyage tellement pénible qu’il entraine parfois de véritables aggravations, ce jour là, Messieurs, auprès de tous les gens de cœur, notre cause a été gagnée. Ce n’était plus une faveur, c’était un acte d’humanité.
    Eh bien, messieurs, ne vous semble-t-il pas qu’il y ait lieu de donner aussi une pensée à ces auxiliaires si intéressants ?
   C'est à leur santé, Messieurs, que je vous propose de boire ; oui, Messieurs, à la santé de nos malades

   M. Gustave TOURNÉ, conseiller d’arrondissement du canton d’Arudy. M. Gustave TOURNÉ, conseiller d’arrondissement du canton d’Arudy.
   Messieurs,
   J’ai l’honneur de porter un toast à la Presse, si dignement représentée au milieu de nous.
   Nous savons par expérience quel généreux concours elle est toujours prête à offrir à toutes les causes d’intérêt public.
   Mais vous ne serez pas cependant surpris si je mentionne tout spécialement notre Presse thermale dirigée par M. Aras et le Dr Cazaux.
   Je ne sépare pas dans l’expression de ma pensée les deux journaux de Pau l'Indépendant et le Mémorial qui pendant de longues années ont si vaillamment combattu pour la création de cette ligne que nous inaugurons aujourd’hui.
   Il est de notre devoir de leur exprimer ici toute notre reconnaissance.
   Je bois donc Messieurs bien cordialement à la Presse.

   M. le Dr Marcelin CAZAUX, rédacteur en Chef du Journal des Eaux-Bonnes.M. le Dr Marcelin CAZAUX, rédacteur en Chef du JOURNAL DES EAUX-BONNES.
   Je remercie l’honorable orateur qui, dans son toast, a bien voulu faire une mention spéciale de la Presse thermale.
   Cette Presse thermale, dans son humble sphère poursuit un but important : les intérêts de la santé publique.
   Il y a eu même une heure où, à la suite d’une guerre douloureuse dont nous gardons tous le souvenir, il lui est échu un devoir patriotique à remplir : celui de prouver que les eaux minérales françaises étaient toujours égales et souvent supérieures aux eaux allemandes, et que par conséquent c’était faire acte de mauvais citoyen que d’aller sans nécessité porter notre or au-delà du Rhin.
   Cette campagne à coups de plume a eu pour résultat l’abandon des stations allemandes par la clientèle française ; c’est une petite revanche en attendant l’autre qui sera l’œuvre et la nouvelle armée nationale dont je vois à cette table l’un des plus dignes représentants, M. le général Gaillard.
   Dans cette revendication en faveur des thermes de France, vous me permettrez de donner une place au Journal des Eaux-Bonnes déjà vieux dans la carrière. Le mérite de sa fondation revient à trois de nos compatriotes parmi lesquels je ne saurais manquer de citer le regretté Dr de Bataille, ancien conseiller général de, Laruns. Sa perte, vivement ressentie, l’aurait été davantage encore s’il ne s’était trouvé pour le remplacer un homme dont vous connaissez tout le dévouement aux intérêts de la Vallée, M. Auguste Porte.
   Je ne sais si le journal, destiné à faire connaître au loin les vertus de nos eaux et les splendeurs de nos montagnes, destiné aussi à hâter, si possible, l’avènement de ce jour de fête, la fête du chemin de fer, je ne sais, dis-je, s’il a rempli son but : mais ce que je sais, c’est qu’il est passionnément dévoué à ce pays et qu’il restera sur la brèche pour défendre, avec le concours de son excellent frère cadet, la renommée à la fortune des Thermes Ossalois.
   C’est là, messieurs, ce qui nous tient le plus au cœur ; et c’est pour cela que nous vous proposons de boire avec nous : à la gloire des merveilleuses sources des Eaux-Bonnes et des Eaux-Chaudes !

   M. A. ARÊAS, rédacteur en chef du Courrier D’Eaux-Bonnes et de la Gazette D’Eaux-Chaudes.M. A. ARÊAS, rédacteur en chef du COURRIER D’EAUX-BONNES et de la GAZETTE D’EAUX-CHAUDES.
    Messieurs,
   Mon excellent confrère du Journal des Eaux-Bonnes a très-bien répondu au nom de la presse Eaux-Bonnaise aux expressions flatteuses que lui a adressées notre sympathique conseiller darrondissement M. G. Tourné. Mais à côté de cette presse, une autre a pris naissance à Eaux-Chaudes. Ainsi le veut le développement des stations thermales qui a provoqué la création de feuilles spèciales.
   C’est ainsi qu’aujourd’hui, au moment où a lieu cette belle fête, un double cri d’enthousiasme sort à la fois du fond de la gorge de La Sourde et du fond de celle du Hourat. Du pied du Pic de Ger et des contreforts du Pic du Midi, des deux cotés du superbe Gourzy, la presse d’Eaux-Bonnes et celle d’Eaux-Chaudes se tendent fraternellement la main, saluant joyeusement la réalisation de la grande œuvre dont nous fêtons aujourd’hui l’inauguration.
   C’est que la presse ne saurait se désintéresser de tout ce qui touche au progrès, car elle en est elle-même une des plus brillantes manifestations. Et je n’en veux, Messieurs, d’autre preuve que la présence à cette solennité de nombreux représentants de la presse.
   Je remercie mon confrère du Journal des Eaux-Bonnes, d’avoir laissé à son frère cadet l’honneur, qui se traduit pour moi en un plaisir, de souhaiter une franche et cordiale bienvenue à nos confrères de la presse départementale et parisienne.
   C’est leur santé que je porte, persuadé d’avance que vous vous associerez de tout cœur au toast chaleureux que j’ai le plaisir de proposer.

   M. ROUTURIER, rédacteur à la GIRONDE. M. ROUTURIER, rédacteur à la GIRONDE.
   répondant au nom de la presse, remercie M. Arêas de ses aimables souhaits de bienvenue. Il ajoute que si la distance matérielle qui le séparait ainsi que ses confrères, de la presse ossaloise était longue, ils étaient près par le cœur et unis dans cette même et belle pensée : le progrès.
   Il est vraiment heureux d’avoir assisté à cette superbe journée, d’avoir visité cette pittoresque vallée d’Ossau et cédant à l’admiration qu’elle lui inspire, il boit à la santé de tous ses habitants.

   M. BONNECAZE, maire de Bilhère et vice président du Syndicat du Haut-Ossau. M. BONNECAZE, maire de Bilhère et vice président du Syndicat du Haut-Ossau.
   examine spécialement l’influence du chemin de fer sur l’industrie pastorale et agricole, et remercie le Gouvernement d’avoir doté la vallée d’Ossau de cette voie ferrée qui va aider puissamment à son développement.

   M. E. BARTHE, conseiller général. M. E. BARTHE, conseiller général.
   parlant au nom des représentants de l’arrondissement d’Orthez est heureux d’assister à cette fête toute béarnaise.

   M. le Dr DELVAILLE, adjoint au maire de Bayonne. M. le Dr DELVAILLE, adjoint au maire de Bayonne.
   porte, au nom de la ville et de l’arrondissement de Bayonne, la santé de M. le sénateur Duclerc, qui ne néglige rien de ce qui peut-être favorable au département

   M. BERNIS, juge de Paix d’Arudy. M. BERNIS,juge de Paix d’Arudy.
   Messieurs,
   Dans cette fête essentiellement ossaloise, nous manquerions à un devoir si nous ne portions la santé d’un des glorieux enfants de la vallée. Je vous propose donc un toast au vénérable Gaston Sacaze, au savant pasteur-naturaliste.
   M. Bernis conduit Gaston Sacaze à M. le Préfet qui lui serre la main et le félicite de ses travaux sur la flore ossaloise.
   M. Gaston SACAZE. dit à M. le préfet que l’amour de la science et son patriotisme l’ont seuls poussé à entreprendre l’étude de la flore ossaloise.
   Le vieillard demande à M. le Préfet la permission de lui dire que, malgré leur fierté, les ossalois sont d’un caractère doux et qu’il est facile de les administrer, surtout lorsque le Gouvernement a des réprésentants qui, comme M. le Préfet, possèdent l’esprit de justice et de conciliation qui sont les principales qualités de tout bon administrateur.

   M. TAPIE, conseiller d’arrondissement du canton de Laruns. M. TAPIE, conseiller d’arrondissement du canton de Laruns.
   dit que dans cette solennité il ne faut pas oublier la devise ossaloise : Ussau e Béarn, vive la vaca !
   Il porte aussi un toast au travail et à la République.
    M. BERNIS, Juge de Paix d’Arudy. rappelle les excellentes relations qui existent entre les vallées frontières, qui sont unies par le cœur et par les intérêts.
   Il boit à M. Galisteo, Vice-Consul d’Espagne à Oloron.

   M. GALISTEO, vice-consul d’Espagne à Oloron. M. GALISTEO, vice-consul d’Espagne à Oloron.
   remercie M. Bernis des excellentes paroles qu’il vient de prononcer et qui traduisent les sentiments de ses compatriotes.
   Il est heureux d’assister à cette fête et porte un toast à la France et au Béarn

   M. LOUMIET, conseiller municipal à Laruns. M. LOUMIET, conseiller municipal à Laruns.
   dit que cette date mémorable, qui marque une ère nouvelle de progrès et de prospérité, doit être inscrite en lettres d’or dans les annales de la vallée d’Ossau.

   M. PORTE, conseiller général du canton de Laruns. M. PORTE, conseiller général du canton de Laruns.
   remercie les personnes qui ont répondu à l’invitation du comité d’Arudy-Laruns, et qui ont ainsi voulu s’associer aux Ossalois pour fêter l’ouverture du chemin de fer. La vallée d’Ossau n’oubliera pas cette marque de sympathie

   M. CAMPS, conseiller général du canton d’Arudy. M. CAMPS, conseiller général du canton d’Arudy.
   Messieurs,
   Je ne saurais laisser passer cette journée mémorable pour notre chère vallée d’Ossau, sans adresser à mon tour, au nom du canton d’Arudy, mes plus sincères remerciements à toutes les personnes, qui, en nous honorant aujourd’hui de leur présence, nous ont donné un témoignage de sympathie qui restera gravé dans nos coeurs.
   Je me fais l’interprète de nos populations pour en témoigner toute notre reconnaissance


     Après le banquet, M. le Préfet s’adresse sur ton le de la plus franche, cordialité à M. Gaston Sacaze et lui donne l’accolade.
    Nous tenons à noter cet incident, car il fait le plus grand honneur à la fois à l‘administrateur éclairé qui est à la tête de notre département et au modeste savant qui est une des célébrités de la vallée d’Ossau.
   
Vers 9 heures du soir, de nombreuses voitures, précédées par les guides d’Eaux-Bonnes, en tête desquels chevauche leur brave doyen, le vieux père Lanusse, conduisent les invités à Eaux-Bonnes.
    La station thermale est en fête. Le jardin Darralde est éclairé à giorno par la lumière électrique et par les feux multicolores des lanternes vénitiennes.
   L’orchestre municipal joue les plus beaux morceaux de son répertoire, tandis que dans le jardin se presse une foule compacte, telle que nous n’y en avions jamais vue. La fête de nuit se termine par un superbe feu d’artifice, dans lequel M. Lissonde a étalé devant nos yeux éblouis, de vraies merveilles de pyrotechnie.

   Sources

  • A. ARÊAS, Gazette d'EAUX-CHAUDES de LARUNS et de GABAS-Vallée d'Ossau troisième année- N° 41 Dimanche 8 Juillet 1883
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