La vallée d'Ossau :              
                 Culture et Mémoire



NOU'M BIENGUES DABAN NI DARRÈ

Nou'm biengues daban ni darrè
Cruel qui m'as quittade !
Credès qué nou'm soubieneré
Ta paraüle faüussade ?
Nou, jamey nou't perdounéré,
Trop puncha l'agulhade !

Aüu permé tems dé ta amous,
Que nou hasès, perfide !
Aban d'obtiené mas favous
Lountems m'as perseguide
Et boulatyé, quoan ès hurous
Qué'm lèches esbarride.

Cade bruchou d'aquét bousquét,
Cade pè de heüguère,
Et lou tendré roussignoulét
Bé't countaben sincère.
Més qué's troumpaben; en sécret
Qu'as tadit ta beryère.

Jou crédouy à touns juramens,
Que't balhey le mie tendresse ;
Témoein dé touns empressemens
Qué'm liurèy à las toues caresses.
Ah ! si n'ère qu'û passe-tems
Perqué'm hasès tan de proumesses ?

Hè leü, bisté, hém dounc mouri ;
Qué tardes tan, boulatyé !
Quin prens plasé dém ha souffri
Acabe toun oubratyé.
D'exemplé jou qué baü serbi
A las aüts deü bilatyé.

Bé pots courré, bé pots ana
Cerca gnauté beryère.
Quauqu'ue bé's en troubera
Qui benyera moun cô sincère.
Qu'auras bèt jémi, souspira,
Qué's trufera dé ta misère.

Bé pots courré , bé pots ana
En touts locs dé la terre,
Per tout moun oumbre etd'séguira
Et bétd'hara la guerre ;
Betleü lou ceü que'm benyéra
Per û esclat de tounerre.

Ne me viens devant ni derrière
Cruel qui m'as quittée !
Tu croyais que je ne me rappellerais pas
Ta parole faussée ?
Non jamais je ne te pardonnerai,
L'aiguillon pénétra trop avant !

Au premier temps de tes amours
Que ne faisais tu pas perfide !
Avant d'obtenir mes faveurs
Longtemps tu m'as poursuivie,
Et, volage, quand tu es heureux
Tu me laisses dans l'abandon.

Chaque branche de ce bosquet,
Chaque pied de fougère,
Et le tendre rossignol
Te croyaient sincère
Mais ils se trompaient en secret
Tu as trahi ta bergère.

Je crus à tes serments,
Et je te donnai ma tendresse ;
Témoin de tes empressements
Je me livrai à tes caresses.
Ah ! si ce n'était qu'un passe-temps
Pourquoi me faisais-tu tant de promesses ?

Allons, vite, fais-moi mourir ;
Pourquoi tardes-tu tant, volage !
Comment prends tu plaisir à me faire souffrir
Achève ton ouvrage.
D'exemple je vais servir
Aux autres du village.

Tu peux courir, tu peux aller
Chercher une autre bergère.
Il s'en trouvera quelqu'une
Qui vengera mon cœur sincère.
Tu auras beau gémir, soupirer,
Elle se moquera de ta misère.

Tu peux courir, tu peux aller
En tous lieux de la terre,
Partout mon ombre te suivra
Et te fera la guerre ;
Bientôt le ciel me vengera
Par un éclat de tonnerre.


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