La vallée d’Ossau :              
                    Culture, et Mémoire.




LE COMBAT DE LA CAZE
DE BROUSSETTE9



otons qu’une diversion avait appelé l’attention sur la haute Vallée d’Aspe.
    Le Général d’Exea à reçut (à Pau) une lettre du Directoire du district d’ Oloron (elle est datée du 29 juin) par laquelle il lui fit part des mouvements des Espagnols qui annoncent une invasion du cote de la Vallée d’Aspe. Quatre heures après, arrivent deux députés de la Vallée de Bedous, peu éloignée de la précédente et qui témoignent les alarmes les plus vives. Elles sont fortifiées par le rapport que le citoyen Couture, capitaine de la légion des Chasseurs de Montagnes, envoyé sur les lieux par le Général pour les examiner, lui adresse. Il en résulte qu’il y a eu en Aspe dans la nuit du 23 au 24, un mouvement qui a produit l’incendie des deux bâtiments de Peyranère. Il réclame, en conséquence, pour garder et défendre les delilés des montagnes, une force armée de 697 hommes.
     Il semble bien que, du côté français, aucun système de renseignement sérieux n’ait fonctionné. Aucune antenne n’a donné l’alarme. La concentration des troupes du Prince de Castel Franco s’est opérée dans la Vallée de Thène sans éveiller en rien l’attention des avant-postes, ou provoquer un avertissement quelconque. On peut observer qu’il y avait déjà en haute montagne, un front continu permanent, et surtout qu’il y a rupture entre les Ossalois qui gardent des liaisons en Espagne et les autorités militaires françaises.
     Les forces espagnoles comprenaient : des troupes légères : Mignons de Saragosse, volontaires d’Alcega et de Perena, quelques « contrebandiers » graciés, des troupes de ligne comptant les compagnies d ’élite, grenadiers et chasseurs des gardes Wallonnes, des régiments d’Aragon, de Murcie, de la Princesse et Provincial de Tolède, deux piquets de la Garde Wallonne et du régiment de Tolède, cent hommes démontés du régiment de cavalerie de Bourbon, le 3e bataillon du régiment de la Princesse. Garnison ordinaire de ce secteur, des obusiers de montagne. Il est difficile d’établir les effectifs.
     Cependant, le rapport mentionne l’engagement à la colonne des troupes de ligne de droite de quatre compagnies de chasseurs. Comme il devait y avoir égalité de compagnies de chasseurs et de compagnies de grenadiers, puisqu’il y en avait une de chaque sorte par bataillon, on peut compter au moins sur 8 compagnies à cette colonne, probablement autant à la colonne de gauche. Les cinq régiments mentionnés ne seraient-ils représentés que par un bataillon, cela ferait déjà 10 compagnies d’élite. Il pouvait y avoir plusieurs bataillons d’un même régiment, et donc 12, 14 ou 16 compagnies, mais guère plus. Avec les deux piquets, les cent cavaliers et le bataillon de la Princesse, soit qu’il ait détaché ses compagnies d’élite, soit que celles de ce régiment mentionné avec les colonnes fussent tirées d’un autre bataillon, avec les troupes légères, cela représente la valeur de plus de quatre bataillons de troupes d’élite, pour la plupart, soit de quinze cent à deux mille hommes, environ, peut-être 2.500 au plus.
     Le Prince de Castel Franco forma ses troupes en quatre colonnes, deux de troupes légères, deux de troupes de ligne.
     La colonne de droite des troupes légères commandée par deux capitaines devait « par les monts Zava (sans doute Sobe) qui tombent a droite (est) de l’auberge » prendre les défenseurs à revers.
     La colonne de gauche, aux ordres de deux capitaines, dont l’un gradé Lieutenant Colonel « devait passer par le Mont Pombie qui tombe à gauche (ouest de l’auberge) et les prendre par derrière. »

    Les troupes de ligne formaient aussi deux colonnes. Celle de gauche, commandée par le Duc de Grenade, devait prendre position au poste d’Aneu pour arrêter toute attaque des ennemis, et soutenir la manœuvre d’encerclement de nos troupes légères par le Mont Pombie. Celle de droite était aux ordres du Général en Chef, assisté du Major Général D. Ignacio Lancaster : le Brigadier D. Juan Carrafa commandait les compagnies de grenadiers et de chasseurs avec lesquelles marchaient les aides de camp du prince. « Elle devait prendre position au poste d’El Loradé. »
     Le 30 juin à 5 heures du soir, les 4 colonnes quittent Sallent. » Les deux de troupes légères grimpèrent toute la nuit par des monts impraticables pleins de neige, les deux autres qui avaient à couvrir une moindre distance, firent une halte de quelques heures et le 1er juillet à 4 heures du matin, tous étaient à leur poste ». Les deux colonnes de troupes de ligne furent « formées en bataille ». C’est à dire déployées.
     « Au signal donné, qui était le tir d’un obusier, les troupes légères occupèrent quelques hauteurs et commencèrent leur attaque par derrière et par les flancs, en se portant entre les postes ennemis et le lieu de Gabas en France qui est à 2 lieues de ce point ci.
     Les Français, se voyant assaillis, se mirent en bataille et utilisant les rochers et les arbres, ils firent un feu trés vif sur les nôtres.
     Pour ces motifs, j’ordonnai à quatre compagnies de chasseurs de descendre d’El Lorade : elles devaient attaquer de front et soutenir les troupes légères.
     A ce moment, aprés une défense obstinée, les ennemis se trouvaient presque cernés : les uns se rendirent, les autres s’enfuirent et se cachèrent dans les bois voisins. Plus de cent d’entre eux restèrent morts sur la place, avec les deux commandants ; quarante prisonniers dont un officier et quatre sergents, dont deux d’artillerie. »
     Du côté espagnol, un mignon de Saragosse fut blessé, un volontaire d´Alcega égaré ; un lieutenant d’artillerie et un artilleur furent blessés par un obus. Le brigadier Don Juan Carrafa, descendant du mont avec les chasseurs, tomba, et ayant roulé sur un grand espace, s’est beaucoup abimé Santilly commente ainsi cette chute : « Je reçois à l’instant la Gazetta. L’article de Carrafa fait plus de pitié que sa chute ne lui a fait de mal. S’il avait pu se tuer pour de bon, il y aurait eu une réjouissance générale dans l’armée, car il en est l’horreur. »
    Soult et Davout n’étaient pas plus aimés que Don Juan. C’était pourtant de trés grands chefs. En bornant ses observations à cette simple remarque Santilly paraît reconnaître l’objectivité du rapport.
     Comme il semble bien que les Espagnols seuls avaient des obus, puisque les républicaines ne tiraient que des boulets, un seul homme aurait été blessé par les défenseurs. La disproportion des pertes est frappante. Si l’auteur du rapport n’a rien dissimulé, on peut penser que nos soldats novices, totalement surpris, à peine éveillés, furent une proie facile et on peut bien parler de massacre.

      Suite...10/11

   Sources

  • Colonel Bernard DRUENE, Les débuts de la campagne de 1793 aux Pyrénées centrales, et le combat de la Caze de Broussette
j y
Contact
Rouleau Down