Prou ban cantat, chens doute, et prou bé canteran
Lou tendre amou, la guerre, et tout ço que de gran
Per lou mounde se hé, despuch que, d'ûe alénade,
Drin de proube en Adam per Diù estou cambiade.
Lous membres beû poussen, deù cap dinqu'aùs talous,
Coum aùs arbes se hèn , et branques et boutous;
Et soun sang que coula, peu miey de sas artères,
Coum l'ayguelte qui court capbat las arribères;
Et coum lous rays d'eii sou s'en ban tout escaùhan
La calou que s'esten, hens sa car, en baran.
Qu'es desbeille, qu'es l'hèbe, et sus membres qu'agitte ;
Sous oueils se soun plantats, cadù dens sa guéritle ;
Sou nas s'en ba senti ; sa ma que sab tasta
Sa longue, dens soun clôt, que s'apreste à gousta;
Per Paûreille qu'entén , quoan nou Ta pas trop dure :
Aquels utis que soun lous cinq sens de nature,
Et malaye la serp, doun lou béroy accens
A l'homni hé senti qu'abè ù gnaùte sens ! |
Assez on a chanté, sans doute, assez on chantera
Le tendre amour, la guerre et tout ce qui se fait de grand
Dans le monde, depuis que, par son souffle,
Dieu changea un peu de poussière en Adam.
Ses membres lui poussèrent de la tête aux talons,
Comme aux arbres se font et branches et bourgeons.
Et son sang coula à travers les artères,
Comme l'eau qui court à travers les vallées.
Et comme les rayons du soleil s'en vont tout réchauffant,
La chaleur s'étend dans ses chairs en tournoyant.
Il s'éveille , il se lève , il agite ses membres.
Ses yeux se sont plantés chacun dans sa guérite;
Son nez va sentir; sa main sait tâter;
Sa langue dans son trou s'apprête à goûter;
Par l'oreille il entend quand il ne Ta pas trop dure.
Ces outils sont les cinq sens de nature,
Et maudit le serpent dont les jolis accents
A l'homme firent sentir qu'il avait un autre sens !
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