La vallée d'Ossau :              
                 Culture et Mémoire


LE PONT - LONG
Arrêt du Parlement en 1634

e geste protecteur arrivait à point, car voici d'autres attaques de la part des officiers du fisc.
   Un sieur Gassiot de Paraige, avocat, présente, le 6 décembre 1610, une requête au réformateur du domaine du roi, afin d'obtenir, à fief nouveau, une portion du Pont-Long, sous la condition de la laisser en nature de lande et toujours ouverte.
   Les Ossalois firent opposition à cette concession, et l'affaire fut appelée devant le Parlement.
   Le procureur patrimonial intervient et prétend que le terroir du Pont-Long appartient à Sa Majesté. Toutes les questions concernant les droits du domaine et celles de la Vallée, ainsi que les chartes et lettres patentes en faveur des Ossalois furent développées dans ce procès. Le Parlement trouva l'affaire si importante qu'il crût devoir assembler toutes les Chambres pour l'examiner et la juger.
    L'arrêt donna gain de cause à la Vallée (19 décembre 1634). Il est d'une souveraine importance tant par l'énoncé du jugement fortement motivé que par le rappel des chartes et pièces justificatives que la Vallée produisit devant les juges. Nous en donnons de larges extraits :
       Produites Lettres patentes octroyées par Gaston IV, par la grâce de Dieu comte de Foix, de Bigorre, seigneur de Béarn et autres places, de 20 septembre 1463, par lesquelles il est porté que le sieur de Sainte-Colombe, chevalier, W Jean d'Incamps de Busy comme procureurs et syndics des jurats et habitants de la communauté de la Vallée d'Ossau, lui auraient représenté que, combien que le territoire du Pont-Long et la propriété d'icelui aie appartenu et appartient aux dits habitants d'Ossau, et qu'en cette qualité ils soient en possession d'en jouir comme ils en jouissent aujourd'hui avec tout pouvoir de couper, dailler, faire coucher le bétail de jour et de nuit, y faire des cabanes en tout temps, carnaler les bétails de tous ceux qui n'ont de servitude en icelui et, qu'en ce l'an 1319, la dite Dame Jeanne d'Artois, comtesse de Foix, et son fils Gaston auraient promis, juré avec serinent, qu'ils ne permettraient jamais que par eux, ni par leurs bayles, officiers, ni par nul autre que, ce soit, le dit terroir du Pont-Long ne serait :labouré, ni mis en culture, ni rien faire, ni attenter au préjudice du droit de ceux de la dite Vallée d'Ossau, réservant la paix de ceux de Pau et d'Ossau suivant leurs encartements en quoi ils auraient été maintenus par sentence donnée en la Cour Majour entr'eux demandeurs d'une part, et les jurats et habitants de Billère défendeurs d'autre part, du 19 août 1450
       et parce que, le Procureur général aurait baillé interposition contenant que la propriété du dit Pont-Long lui appartenait et que le bayle de Pau avait droit, pouvoir, coutume et usage de carnaler, pignorer tout le bétail qui se trouverait paître dans le Pont-Long, aussi bien que ceux d'Ossau, et au premier qui le pourrait prendre, et le dit bayle en possession et saisine de prendre et vendre la fougère, sotrage et arbres, par laquelle sentence aurait été réservé droit et action à ceux d'Ossau sur les droits que le dit bayle du roi prétendait
      et que néanmoins depuis peu de temps, le Sénéchal et Procureur général et le dit bayle de Pau aurait baillé à nouveau fief et agrier, plusieurs terres du Pont-Long au grand préjudice et dommage des dits habitants d'Ossau, et qu'ils étaient sur le point d'intenter procès et action contre le dit Procureur général, ce qu'ils ne voudraient pas faire,
      suppliant le dit Seigneur Gaston les garder des dits vexations, procès et dépenses qui s'en pourraient ensuivre, le requérant et suppliant qu'il lui plût leur confirmer, adjuger, donner, octroyer, concéder et bailler tous et chacun des droits et devoirs que le dit bayle de Pau, et autres qui ont été depuis tout temps à Pau, y prenaient et avaient usé et accoutumé de prendre, et à ce que le dit Seigneur, ni ses successeurs, ni ses bayles, ni officiers ne puissent dorénavant affiéver, ni bailler à fief nouveau, ni agrier, ni en tout, ni en partie, le droit et terroir du Pont-Long, et que celles qui ont été affiévées ou baillées à agriers leur fussent rendues, et qu'il leur fut permis de les convertir en herms et pâturages ainsi que les autres terres du Pont-Long, et en jouir comme de leur propre bien et domaine
      et de plus que le guide de la terre et pays de Béarn les voulait contraindre de payer droit de guidonage de leur bétail quand ils rentraient et sortaient de la terre et Seigneurie de Béarn, pour raison de quoi ils étaient grandement vexés et inquiétés, ce qui aurait contraint plusieurs habitants de quitter la montagne et peupler ailleurs, ce qu'ils ne feraient pas s'ils étaient francs et quittes de payer le dit droit de guidonage, comme ils lé supplient très humblement de les vouloir affranchir et exempter
       sur quoi, après avoir vu les dits cartes, contrats de la dite Dame d'Artois et du Seigneur Gaston, son fils, ensemble la dite sentence baillée en Cour Majour, et considérant les droits et devoirs que les dits habitants d'Ossau avaient sur le Pont-Long, et auraient eu depuis tout temps, et qui leur sont adjugés par la dite sentence, et la réserve faite par icelle sur les agriers et autres droits que le dit bayle de Pau y prenait, était de petite valeur, ainsi qu'il a apparu par les informations, qui sur ce ont été faites et rapportées, considérant aussi le dommage et préjudice qui pourrait arriver aux dits habitants, tant par le moyen des dits affièvements qui ont été faits et qui se pourraient faire au dit Pont-Long, que pour le payement du guidonage, et voulant éviter la dite stipulation, et pourvoir à l'augmentation et accroissement du peuple de la dite montagne, et ayant égard à la grande obéissance et aux bons et agréables services que les dits habitants d'Ossau ont rendu à lui et à ses prédécesseurs, et charges qu'ils ont supportées
       de son bon gré, et certaine science et spontanée volonté bien à plein assurée de tout son droit, a confirmé tant pour lui que pour tous ses successeurs la donation, concession et octroi faits à ceux d'Ossau du dit Pont-Long par la dite Jeanne d'Artois et le dit Seigneur Gaston, son fils; en tant que besoin serait donné, concédé, octroyé et par la teneur de ces présentes a confirmé, donné, concédé, octroyé perpétuellement et à jamais aux dits jurats et communautés de la montagne d'Ossau, présents et à venir, tous les dits droits de carnaler, pignorer, attenter, paître, coucher et autres profits et émoluments de quelque condition qu'ils scient, que le dit bayle de Pau prenait, le temps passé, au dit Pont-Long, et que les dits habitants les puissent faire prendre, et retirer dorénavant, ensemble tous les autres droits, profits, utilité, émoluments et garderies, que le dit bayle de Pau prenait et avait coutume de prendre à son nom, sans que les bayles qui sont à présent, ni qui seront à l'avenir, puissent prendre, exploiter, carnaler, ni pignorer pour raisons de la dite cause de la dite servitude, ni exploiter au dit Pont-Long, ni autrement en aucune manière, nonobstant tous les affièvements faits jusqu'au dit jour, se réservant la juridiction haute, moyenne, basse, mery, mixti, et imperi, lois grandes et petites et autres droits appartenant à sa Seigneurie et Souveraineté, et a promis et promet par la teneur des présentes, pour lui et pour ses successeurs, de n'affiéver à nouveaux fiefs, ni donner et bailler agriers, ni par lui, ni par ses officiers, le dit Pont-Long en tout ni en partie, en aucune manière que ce soit, et a affranchi et affranchit par la teneur des mêmes présentes, pour lui et pour ses successeurs perpétuellement et à jamais les dits jurats et communautés d'Ossau et leurs successeurs du dit droit de guidonage, et que leur bétail de quelle nature et condition que ce soit ne serait tenu de payer à lui, ni à, ses fermiers, imposant silence perpétuel sur les dits droits du Pont-Long et guidonages, à tous ses trésoriers, bayles de Pau, et procureur général, pour le présent et pour l'avenir, mandant et enjoignant au Sénéchal, juges, procureurs, trésoriers et autres officiers, que le contenu aux dites lettres patentes, ils fassent et laissent jouir les dits jurats et habitants d'Ossau, leurs successeurs, sans leur permettre de porter aucun empêchement ; au contraire veut et entend qu'ils les en laissent jouir ce qu'il leur a octroyé tant pour les considérations sus dites, que pour ce qu'ils lui ont donné la somme de 2.400 florins pour l'aider à faire l'œuvre du château de Pau.
       Dit a été que la Cour a relaxé et relaxe les syndics et jurats d'Ossau tant de la requête de Paraige que des demandes, fins et conclusions du procureur général et patrimonial du roi, en tant, a maintenu et maintient les habitants d'Ossau en la propriété et jouissance du terroir du Pont-Long, aux conditions et servitudes acquises aux habitants de Pau et autres usagers, suivant les accords passés entre eux, à la charge, de prêter serment de fidélité à chaque mouvance de Seigneur; le tout conformément aux accords et transactions portées par lettres patentes de Gaston,
      souverain du Béarn (20 sept. 1463) et confirmation portée aux lettres patentes octroyées par Henri II, en 1539, pareillement a maintenu, maintient les dits procureurs général et patrimonial à la propriété, possession et jouissance des bois de Lousse et de Larron, sans préjudice néanmoins des droits de pacage et usage prétendus par les habitants d'Ossau et de Pau, pour en jouir par eux conformément à l'arrêt sur ce donné le 29 janvier 1618, Lettres patentes de. Sa Majesté confirmatives d'icelui du 22 février 1620, et jusqu'à ce qu'autrement au procès pendant en icelle entr'eux, le garde du bois et le procureur général du roi, par la cour en soit ordonné. »

          Prononcé au parlement de Navarre séant à Pau 19 décembre 1634

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