La vallée d'Ossau :              
                    Culture, et Mémoire.




Raymond CASAU
un crack de la lutte 7


aymond Casau a grandi dans un famille de cultivateurs bergers, avait quatre frères et une sœur, destiné à être lui aussi berger. Né le 22 février 1881, au moulin de Castet, au pied de Lapenne en Vallée d'ossau, fut un "crack" de la lutte.
   Il se distingua très vite de ses jeunes camarades par une force hors du commun. Adolescent, son cœur se détourna de la vie misérable de ses ancêtres bergers pour se laisser attirer par l’eldorado américain qui avait si bien réussi à bon nombre d'Ossalois. Dèslors, son unique but sera de rejoindre Bordeaux pour s’embarquer aux Amériques.Il quitta le sol natal à 18 ans, parvint à la capitale d’Aquitaine et mit à profit sa superbe corpulence pour décharger des sacs de ciment des bateaux à quai.
   Pour gagner plus, il porta deux sacs à la fois. Il sera remarqué pour sa force et son courage et se retrouvera à la salle Martin, haut lieu de la lutte de l’école bordelaise, en compagnie de lutteurs de renom tels que Sabès, Lassartesse, Gambier et Noël le Bordelais.
   Là, il apprit les secrets de ce sport qui allie force et technique et participa au Championnat de Bordeaux amateurs. Après son service militaire, l’Ossalois sans complexe monta à Paris pour lutter aux Folies Bergères sous le nom de Peyrouse II qui ne lui porta pas chance.
   Il retourna à Bordeaux où Lassartesse lui conseilla fortement de remonter à la capitale pour y disputer un tournoi de classe au milieu des vedettes Paul Pons, Petersen, Aimable de la Calmette, Laurent le Beaucairois, Schackman, Vervet, etc.
    Après divers combats sans trop de succès à la Scala, il partit en Allemagne, guidé par son ami Lassartesse, où il obtint ses premières victoires.
   De retour à Paris, il finit quatrième aux Championnats du Casino de Paris et en 1906, deuxième aux Folies Bergères derrière Padoubny, le géant russe. L’année suivante, Raymond Casau dit Cazeaux de la Bastide se révéla une étoile de la lutte après ses victoires à répétitions contre l’Autrichien Schneider, l’Allemand Schackman « l’étrangleur », le champion belge Constant le Marin et Sabès, l’inventeur de « la ceinture en souplesse » lors du championnat international du Sud-Ouest.

   Il se maria avec une fille d’Ossau et en 1908, à l’Apollo de Paris, il fit un si beau combat contre l’Italien Raffaelli que le journal La Presse qualifia l’Ossalois de « merveilleux et courageux champion ». La même année, le 25 novembre, Casau rencontra le terrible Constant le Marin.
   Dans son livre, Ch. Lagarde rapporte ainsi le récit du combat emprunté à L’Auto :
   « Le Belge pesait 150 kg, le Français 93. Première surprise : Cazeaux quelque peu malmené, prend cela pour des brutalités et riposte immédiatement en bourrant le Belge comme il sait le faire.
   Deuxième reprise : Constant embarqué splendidement par un bras roulé se dégage et, chargeant de toutes ses forces, il envoie notre « Raymond » national dans l’orchestre. Deux musiciens sont hors de combat, leurs instruments aussi.
   Troisième reprise : pendant 15 minutes, Constant et Cazeaux fournissent un travail colossal, le ring est littéralement saccagé. Jamais deux hommes n’ont montré autant de vaillance. Pourtant aucun d’eux ne réussit à s’assurer la victoire ».
   Parmi les plus de 1 000 combats que livra l’enfant prodige de Castet dans beaucoup de pays d’Europe, au Canada, aux Etats-Unis, en Argentine, au Brésil, etc., Charles Lagarde insiste entre autres sur ceux de 1911 à Montréal contre le colosse allemand Poli ! Abs et contre le champion du monde Petersen : le Roi des Vaillants, comme on surnommait à l’époque Raymond Casau, eut raison en effet des 260 livres du champion allemand après « une lutte qu’on considéra comme la plus brutale, la plus mouvementée et la plus excitante jamais vue à Montréal et probablement en Amérique ».
   Quant au Danois Petersen, un des plus grands noms de l’histoire de la lutte, 65 minutes lui furent nécessaires pour venir à bout du merveilleux Raymond Cazeaux devant 6 000 personnes éberluées. Deux ans plus tard, toujours au Parc Sohmer de Montréal, le Roi des Vaillants affronta, dans un combat épique de 74 minutes, le champion américain le Dr Roller qui l’emporta.
   Et que dire du combat titanesque entre l’Ossalois et le Belge Constant, Champion du Monde, combat qui dura... 3 heures 30 minutes 50 secondes ! Assurément, Raymond Casau sera de loin le sportif ossalois le plus prestigieux de la Belle Epoque, de renommée nationale et internationale.
   Il mourut le 24 novembre 1923 : il avait à peine 42 ans. Mais avant de quitter cet athlète au cœur tendre, écoutons-le parler de lui-même à travers une interview qu’il donna à l’époque au journal La Presse et reprise dans le livre de Charles Lagarde que je vous invite vivement à parcourir si vous désirez tout savoir sur le Roi des Vaillants.
   « ... J’en ai vu des pays, c’est fantastique ! Mais dans aucun cas je n’ai fait une aussi belle saison qu’au Canada, mais, mon Dieu, que ce fut dur !
    Pensez donc que j’ai disputé là-bas en peu de temps 32 matches. Or chaque match comportait deux manches et une belle s’il y avait lieu.
   Et de plus, au Canada, le lutteur tombé doit être maintenu sur les épaules par son adversaire, jusqu’à ce que l’arbitre vienne dire que le coup est bon.
   C’est quelquefois long. »...
   « ... Le public, en Amérique du Nord, comme en Amérique du Sud, est très emballé sur la lutte. Aussi les journaux publient des articles dont on n’a pas idée en France.
   « Comme je suis plutôt un peu batailleur, j’ai légèrement estomaqué là-bas le public et... les lutteurs. « Mais il faut croire que cela ne déplaisait pas aux spectateurs, puisque partout où je luttais, on refusait du monde.
    Le plus drôle, c’étaient les articles qu’on me consacrait.
   « Cazeaux, disait-on, luttera ce soir au Parc Sohmer. Les spectateurs feront bien de ne pas s’asseoir au premier rang des fauteuils. Il y aurait pour eux danger de mort, Cazeaux jonglant avec un homme comme avec une balle ! »
    D’autres annonçaient qu’une voiture d’ambulance était commandée pour emporter, après la lutte, les morceaux de mon adversaire.D’autres encore disaient que j’étais un ancien curé ayant fait ses études au Séminaire de Bayonne et que des chagrins d’amour avaient éloigné de sa vocation.
   A Montréal, à diverses reprises j’ai vu près de 8 000 personnes réunies pour me voir lutter. »...

   Raymond CASAU fut non seulement un grand lutteur, mais encore un homme sage que la gloire et les triomphes ne grisèrent jamais, un de ces rares champions qui sut tirer un profit durable de l'exercice d'une profession qui, si elle peut être rémunératrice, a une durée limitée.
   Il était Béarnais, doté de réflexion et de sens pratique, oui, mais aussi Ossalois, il était de ces gamins qui couraient pieds nus sur les chemins pierreux de mulets et toujours déguenillés qui, à la belle saison, au carrefour des routes d'Eaux-Bonnes et Eaux-Chaudes près de Laruns, composaient la tribu des mioches qui guettaient les équipages pour les suivre à la course et, main tendue et œil sur le fouet du cocher qui, de temps à autre leur en larguait un coup, mendiaient un « petit sou » en chantant une complainte du temps de la Reine Jeanne.

   Surnommé « le Roi des Vaillants », il acquiert une renommée internationale en lutte.
   Aux États-Unis ou il rencontre Raymond Orteig, autre ossalois de Louvie-Juzon célèbre qui fit fortune, propriétaire, de deux grands Hôtels à New-York. Qui eut, pendant la période de prohibition aux Etats-Unis, des démêlés avec les « Incorruptibles ». En difficulté dans un quartier plus ou moins bien famé, il fut tiré d'une situation délicate par l'intervention du lutteur et des ses amis.
   A son retour en France, Raymond donnait des spectacles de lutte avec d'autres lutteurs.
   Une année, il s était produit en Provence et rentrait avec ses amis en donnant des spectacles dans différentes communes situées sur leur itinéraire. Il adresse une carte à son épouse : « Nous avons couché à V.. Dans la nuit des individus ont voulu nous voler : Ils ne voleront plus pendant un certain temps...»

       Las ! a 42 ans, celui que les plus grands champions n'avaient pu abattre, s'affaissa pour ne plus se relever. Il meurt à Bielle, où il est inhumé, le 24 novembre 1923

   Sources

  • (H.M.O.) Article de Pierre Trésarrieu-Besincq Catherine Casau de Bielle
  • René Arripe, Ossau 1900 le canton d'Arudy, Loubatières
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