La vallée d'Ossau :              
                    Culture, et Mémoire.




LOUSTAUNAU



OUSTAUNAU. Frappé de l'intelligente physionomie d'un jeune pâtre de la vallée d'Aspe, un général Anglais qui la traversait à son retour d'Espagne engagea avec l'enfant une courte conversation, le séduisit par ses promesses, et sans lui donner le temps de dire à sa famille un dernier adieu, l'amena aux Indes Orientales.

    Là, Loustaunau perdit son maître et il exerçait le commerce dans une province du Mongol, lorsqu'une circonstance imprévue vint lui ouvrir la voie de la fortune.

    L'empereur de Delhi et le Nabab de Lahore étaient en hostilités. Du sommet d'une éminence, Loustaunau suivait avec quelques personnes les phases diverses d'une importante bataille que se livraient les deux princes.

    Au spectacle qui s'offrit à ses yeux, il sentit s'éveiller en lui le génie militaire, et dès le début de l'affaire il déclara à son entourage quelle en serait la conclusion. Puis lorsque, conformément à sa prédiction, l'armée Mogole, dont les mauvaises dispositions de défense et d'attaque l'avaient frappé, se trouva complètement battue, il s'étonna de ce qu'elle se résignait à la défaite, quand 1.200 chevaux et deux pièces de canon suffisaient à lui rendre l'avantage.

    Un de ses auditeurs recueillit ses paroles et les rapporta au général Moghol.

    Accouru auprès du pâtre Aspois, qui persista dans ses assertions, le général mit à sa disposition 4,000 chevaux et 10 pièces de canon ; à la tête de ces forces, Loustaunau marche à l'ennemi, et par une habile tactique le foudroie de son artillerie sur les flancs, tandis que sa cavalerie enfonce son centre.

    Victorieux, il ramène ses soldats à leur chef surpris et honteux, et reçoit pour prix de ses services un commandement important.

    Plus tard, Loustaunau se signala de nouveau en diverses occasions, grandit dans la faveur du souverain, épousa une princesse indigène et parvint à une haute fortune. Puis un jour il se souvint des Pyrénées, berceau de son enfance, et désira venir y terminer ses jours.

    Il fit passer en France des sommes considérables et forma en Béarn, en Bigorre et sur les frontières d'Espagne de grands établissements. Malheureusement ses entreprises ne furent pas couronnées de succès. D'inhabiles spéculations compromirent sa fortune ; l'incendie de ses forges, la dévastation de ses propriétés d'Espagne complétèrent sa ruine. Reparti pour les Indes afin de rétablir ses affaires, il fit dans sa route la rencontre d'une femme, lady Stanhoppe, qui, exerçant sur son esprit une fatale influence, l'arrêta dans ses projets ; depuis cette époque jusqu'à sa mort, survenue il y a peu d'années, il mena dans l'Orient une triste existence. Le général, oubliant les besoins de sa famille et le but de son voyage, s'arrêta au pied du Mont Liban, où il mena une vie d'illuminé et de prophète. M. de Lamartine m'a dit l'avoir vu en Orient ; il y a peu d'années qu'il est mort. Ses enfants étaient restés à Tarbes. Trois de ses filles vivent encore ; elles ont passé une vie de privation et de travail, et cependant, comme dans un rêve, il leur souvient des jours de leur première enfance, écoulés dans des palais et au milieu des trésors de l'Inde, dignes des Mille et une Nuits. De LAGIÈZE Ch. de Pau.

   Sources

  • CH.DE PICAMILH, Statistiques générale des Basses-Pyrénées , Imprimerie E.Vignancour, Pau, 1858.
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